Souffle

Une bougie scintille devant le grand miroir qui occupe tout un pan de mur, dans notre salle de danse. Vaste salle de jeux, au plancher en bois, qui sert aux écoliers et se transforme, le soir venu, en une salle de danse, à la lumière feutrée. Quelques objets ludiques et doudous oubliés nous rappellent, l’espace d’un instant, sa fonction première.

Emmanuelle, mon amie et professeure de danse orientale, nous invite à parer nos cheveux de fleurs en tissu et nos fronts de bindis brillants qu’elle a apportés, en hommage à Edwige, danseuse connectée au monde, femme libre et rebelle, qui ornait ainsi sa longue chevelure blonde et son front. Femme déesse inspirante, vibrante de couleurs et d’énergie.

Je n’ai pas eu le bonheur de connaître Edwige, danseuse magnifique, porteuse de sacré, mais je la devine dans tous les mouvements qu’elle a transmis à Emmanuelle, dans la fluidité, la sensualité, la légèreté du corps qu’Emmanuelle nous transmet à son tour. Je m’émerveille de cette filiation magique, de ce savoir qui passe de femme en femme, dans la confiance, le respect, l’écoute, la bienveillance.

La musique commence. Les corps se délient, les épaules roulent, les hanches ondulent généreusement. Le cours qui se déroule, à chaque fois, dans la bonne humeur, se pare d’une joie nouvelle. Une incroyable énergie s’empare de nous, tandis que la flamme de la bougie semble étinceler de milles feux. Nous dansons le cœur léger et plein d’amour. Nous tournons sur nous-même, inlassablement, au rythme de la musique qui s’accélère. Nos longs cheveux chargés de fleurs multicolores s’envolent. Nous sentons que quelque chose nous unit, une force mystérieuse et inexplicable.

Quand débute la chanson Tizi Ouzou d’Idir, nous dansons de tout notre cœur et la danse devient fête. Je pense à Edwige et je lui suis reconnaissante de tout ce qu’elle nous offre, à travers Emmanuelle. Je pense à ma maman partie début décembre, et alors que je danse, je ne ressens que de la joie dans mon cœur. Tout n’est que mouvement et c’est ainsi que doit aller la vie.

Les écrivains rêvent d’immortalité, à travers leurs textes, alors que les danseuses ne meurent jamais. Leurs mouvements, pleins de grâce et d’amour, se prolongent à l’infini. Les danseuses dansent éternellement, avec celles qui dansent dans leurs pas.

 

©  Texte Aliénor Oval / © Photo Louison Jordan – 5/02/24

 

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