Deliverhell /Noir de lune - Spécial Halloween ❤

 

DELIVERHELL


Dans le club, tout le monde est déchainé, pour la soirée d’Halloween. Les corps en sueur, sous les costumes de monstres, s’agitent en tout sens. Scarlxrd hurle dans mes oreilles. Paul en tenue de Joker, et Jules, en costume de Pennywise dansent, avec frénésie, entourés par quelques Harley Quinn, sorcières et autres succubes. On a tous bien bu et je sens que je ne marche plus très droit. Je croise le regard d’une jolie Mercredi Adams qui me sourit. Ce n’est pas la première fois, ce soir, et je crois bien que j’ai mes chances. Alors que j’hésite à l’aborder, un mec en costume de Deadpool s’arrête face à moi et me demande :

       Tu aimes Satan ?

       J’en sais rien. Ce soir j’aime tout le monde !

Il me tend une sorte de flyers, avec un QR code.

-        ….. c’est juste ce soir, alors profites-en !

Je n’ai pas compris le début de sa phrase mais je prends le flyers. Il s’éloigne. Je réalise que j’ai un peu le tournis et une sacrée envie de pisser. Je me dirige vers les toilettes. J’enlève mon masque de Michaël Myers et baisse ma combinaison bien relou. Une fois assis, le flyers un peu froissé dans ma main, je décide de scanner le QR code. Une visio s’ouvre et un jeune métis stylé, avec les cheveux teints en blond polaire, les yeux verts, portant un sweat à capuche blanc et une chaine dorée, commence à me parler, avec un grand sourire charmeur.

-        Salut, Ethan, ça va ?

Je réalise qu’il n’est pas censé connaître mon prénom. La blague va un peu loin. J’essaie de fermer la conversation, puis d’éteindre mon portable, mais pas moyen. La seule idée qui me vient est de plaquer mon portable, contre ma cuisse. Rapidement, je sens une brûlure et, lorsque je le retire, je vois une marque rouge, là où il se trouvait.

Le jeune gars reprend, comme si de rien n’était. Un peu bourré, je ne cherche pas vraiment à analyser la situation.

       Alors mon, pote, flippes pas, comme ça !

       C’est quoi ton délire ?

       Je te propose un deal spécial pour Halloween.

       T’as même pas de costume d’Halloween !

       Moi ? J’en n’ai pas besoin ! Je suis le diable ! Il s’esclaffe.

       Oui, c’est ça… Et tu veux quoi ?

       La question c’est plutôt ce que tu veux, toi ?

       J’aimerais bien voir si ça va matcher dans la soirée, avec la fille déguisée en Mercredi Adams qui m’a souri plusieurs fois.

       Ok. Fais-moi un beau sourire pour valider le deal, en face ID.

Je sens mon portable vibrer.

       C’est cool ! T’es mon bro maintenant.

       Ah, ouais, cool. Bon, je vais retourner à la soirée.

       Il faut que tu descendes au sous-sol, maintenant. N’oublie pas ton vœu.

J’ouvre la porte des toilettes. Tout est sombre. Je ne distingue pas grand-chose, à part l’escalier qui descend au sous-sol. Devant moi, une porte toute noire. Je l’ouvre. L’horreur de ce que je découvre me coupe le souffle. Je chiale comme un gosse. Je hurle. Toutes les personnes présentes à la soirée sont étendues par terre, dans un bain de sang. Paul, Jules, la fille…Du sang sur leurs vêtements, sur leurs visages. Je me laisse tomber sur le sol, anéanti. Tout s’embrouille dans ma tête. Normalement, la soirée ne se déroulait pas au sous-sol. Je ne comprends plus rien. Je me cramponne à mon portable et je relance la visio. En larmes, je crie :

       C’est quoi ce merdier ? Qu’est-ce que tu as fait ?

       Eh, m’embrouille pas, poto. J’ai rien fait, moi. Tu m’as demandé de voir si ça aller matcher dans la soirée avec ta petite meuf et là je te montre ce qui va se passer, durant la soirée, dans très exactement 5 minutes. Une fusillade…et j’y suis pour rien. Enfin, pas directement.

Je me rue vers la porte pour remonter à la soirée et faire évacuer tout le monde, mais la porte reste bloquée, malgré mon insistance. Je sens la sueur froide couler dans mon dos et je hurle :

       C’est quoi ça encore ? Pourquoi je peux pas sortir ?

       T’es au premier sous-sol, tu peux pas remonter maintenant. Et c’est pas ma faute si tu as fait un vœu éclaté. En ce moment, tu pourrais être à Miami ou à Las Vegas, avec tes potes et ta meuf, en train de dépenser des millions de dollars.

       Il doit y avoir un moyen. Tu peux bien faire quelque chose, non ? J’éclate en sanglots.

       Je peux ouvrir cette porte, mais je ne peux pas te faire remonter. C’est le deal. T’as pas écouté ce que t’as dit Deadpool, tout à l’heure ?

       Fais quelque chose, je t’en prie. A bout de nerf, je crie et m’agite en tous sens.

       Bon, j’ai une mauvaise nouvelle, ça fait 5 mn, poto. Ils sont tous morts là-haut.

Je m’effondre, abattu. La vision des corps ensanglantés, enchevêtrés, m’est insupportable.

-        Fais-moi sortir ! Maintenant ! Tu me dois bien ça.

-        J’avoue, mais tu devras descendre au deuxième sous-sol et je ne sais pas si t’as compris, cette fois-ci, mais quand tu descends, tu ne remontes plus. Tu veux quoi ? Demande pas un truc de ouf, parce que tu te doutes que ce sera non, hein.  Et dépêche-toi parce qu’il est presque minuit et mon offre spéciale va se terminer bientôt.

-        Je ne veux plus être au milieu de tous ces morts. Je vais devenir fou. Je veux être dans un endroit paisible.

-        Ça c’est possible pour mon gars, Ethan. Tu connais, tu sors, tu descends et tu ouvres la porte.

Je m’exécute la mort dans l’âme. A peine ai-je ouvert la porte que je me retrouve seul, au milieu de l’océan, accroché à une minuscule planche en bois. J’essaie de grimper dessus, mais cela semble irréalisable et j’échoue, à chaque fois. Mon portable vibre. Je reçois une notif Deliverhell. Je démarre une nouvelle visio.

-        Hey bro, bien ou quoi ?

-        Tu vas pas me laisser là ! Je ne peux même pas monter sur la planche. Et si je coule, il se passe quoi ? Je meure ?

Il éclate de rire.

-        Bah, il ne se passe rien. Tu continues encore et encore.

-        Aide-moi ! T’es le diable, non ?

-        Euh, oui. Officiellement, je suis le diable, mais disons plutôt que je suis un sous-traitant. Deliverhell, tu vois le délire...

La nuit tombe et je commence à paniquer.

-        Je vais devoir te laisser, poto. Il est presque minuit et le deal Deliverhell va se terminer jusqu’à l’année prochaine. On se revoit dans un an. Force !

L’écran s’éteint. Le corps immergé dans l’eau glacée, je flotte, dans le noir absolu.

 

© Texte et photo Aliénor Oval – 31/10/2023


NOIR DE LUNE



Le voile sombre se déploie majestueusement sous mes yeux. Le pâle éclat de la lune ruisselle sur ma peau humide. Frénétiquement, mon corps ondule au rythme des battements qui émanent des profondeurs de la terre. Mes pieds foulent l’herbe noire. Des arbres immenses, au feuillage dense, m’encerclent. Leurs cimes se courbent vers moi, dans une infinie lenteur. Je tournoie, nimbée par les voiles noirs et translucides qui virevoltent et caressent mes bras nus. Tout est distordu. Une myriade d’yeux jaunes et phosphorescents brillent dans les bois obscurs. D’étranges créatures de la nuit m’observent, en silence, tandis que je danse, au cœur de la nuit. Un long voile noir, transparent, flotte dans les airs, dans le prolongement de mes bras qui s’agitent. Une fleur noire émerge, dans un souffle. Mes hanches ondoient, telles un ruisseau de montagne. Le voile vole, au-dessus de ma tête rejetée en arrière, cheveux au vent, puis vient caresser mes courbes sinueuses. Des cris terrifiants proviennent des masses sombres et indistinctes, derrière les arbres. La lune s’enflamme, d’une teinte de brasier. Mon corps est secoué de spasmes. Bras déployés en croix, tendant le voile, comme les ailes brisées d’un papillon de nuit. Ma tête se fige sur le côté. Mes yeux se révulsent. Je sens une brûlure sur ma peau, comme si l’on approchait une flamme. Tout la forêt fait écho aux chocs assourdissants qui proviennent du sol. Une voix murmure dans mes oreilles, les mots d’une langue oubliée que je comprends. Je vois le flamboiement d’une lune en feu, sur le lac sombre. Je serpente vers le lac qui m’appelle. Je tends les bras vers les cieux obscurs, mains jointes, les deux pans du voile noir retombant sur mon visage et perçois une ombre tout près de moi, qui s’approche, en une lente reptation. Sur le bord du lac, dans le reflet de la lune, je découvre le mien.  L’ombre m’entoure complètement, désormais. Je laisse retomber un pan du voile et contemple mon visage diaphane et mes yeux blanc nacré. Des mots inconnus sortent de ma bouche, tandis que s’en écoule un fin filet noir. A l’endroit même où se trouve le reflet de la lune embrasée, dans le lac ténébreux, naissent de véritables flammes noires. Je déploie, sur mon visage, le deuxième pan du voile qui m’enserre, telle une chrysalide. Je suis fille de la lune noire.

©Aliénor Oval Texte et photo – 31/10/2023


Commentaires

  1. J'adore ! Toujours aussi surprenant et j'adore les détails, les descriptions : on s'y plonge très facilement ! Brrrr

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    1. Merci beaucoup Anne-Do! Je suis toujours contente de pouvoir susciter quelques frissons. ;)

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